La Norton Atlas 1968 du Yéti

 

J’ai acheté cette moto lorsque j’avais 34 ans et mon expérience se limitait à quatre années au guidon d’une Royal Enfield Bullet de 2002. Je voulais alors une vraie anglaise plutôt des années 60 et qui me permettrait de voyager loin en duo. Une Triumph T140 aurait très bien fait l’affaire mais c’est cette Norton qui s’est présenté en 2006 dans les annonces de M.A.C. Bien que complète et tournante, elle était à bout de souffle. Mais, inconscient, j’avais très envie de me lancer dans une restauration pour apprendre la mécanique.

 

A l’achat, je savais qu’un des cylindres avait du mal. Face à un faisceau électrique très détérioré et « aidé » d’un manque d’expérience flagrant, j’ai entrepris de refaire toute l’électricité. Après un an de déprime dans le sous-sol de mon immeuble, Tricati, éminent amateur de 3 cylindres anglais aussi réputé pour sa gentillesse que pour ses compétences mécaniques, est venu me donner un coup de main. Face à l’étendu des dégâts, il récupéra la moto pendant un mois.

 

 

Reconstruction du faisceau électrique, traitement antirouille, changement des durits et ajout d’un filtre à huile, passage en carburateur unique et je pus enfin rouler. Enfin presque rouler puisqu’une Twingo me coupa la route alors que j’allais au bureau en Bullet. Epaule en vrac, radius en neuf morceaux… trois mois après, je pouvais enfin aller à l’AMC en Ardèche avec le Norton.

 

 

Je venais de passer l’été 2007 à rouler avec l’Atlas, AMC, Nickeled Feet, Neurton, pas trop loin de la maison car je ne connaissais pas suffisamment la bête. En même temps, la Bullet avait rejoint le garage d’un copain carrossier pour être remonté. En gros la fourche était morte plus quelques accessoires. Malgré une main droite encore moins habile que d’habitude, je l’avais remonté et gagné en assurance comme en compétence mécanique. Et en plus, je m’étais vachement fait plaisir !!!

 

A l’hiver, je me suis décidé à refaire toute la partie cycle du Norton. Elle était très rouillée, bidouillée, parfois même il manquait des boulons. Les anciens du forum m’avaient mise en garde contre les restaurations « à l’américaine ». Mais pas de soucis dans mon cas, le but étant de rouler donc priorité à l’utilitaire et pas au boulon d’origine. Le moteur fonctionnant pas trop mal, il n’y avait pas de raison d’y toucher pour l’instant. Tant mieux pour mon porte monnaie. Direction le garage du copain, qui m’avait réservé un coin de l’atelier.

 

 

Le démontage de la partie cycle fut assez facile. J’ai même pris des notes mais pas vraiment de photos car quand on a les doigts noirs, pas facile de manier l’appareil. J’avais aussi une collection de petites boites pour ranger les petites pièces à chaque étape. Le plus difficile fût d’avoir de la disponibilité, le garage étant fermé le week-end, c’est sur les récup’ et RTT que je pus avancer. Sur la fin, ce fut même de 7h à 10h en semaine avant de foncer au bureau, les ongles encore un peu noir.

Après dépouillage, le cadre fut sablé et passé à l’époxy noir. Le reste des pièces de carrosserie fut également repeint en noir. Pour la boulonnerie, comme une grande partie était très abimée, j’ai acheté des lots neufs complets en UNC, UNF et métrique. Un soin particulier fut apporté au serrage avec utilisation systématique de rondelle Grower. Les roulements de direction furent remplacé par des roulements étanches, l’axe de bras oscillant fut entièrement remplacé, de même que les chaines primaire et secondaire, un disjoncteur a été ajouté au niveau de la batterie, la clef de contact 4 positions est maintenant sur le tableau de bord et remplace le contacteur code-phare.

J’ai également choisi de conserver certaines pièces non d’origine mais que les précédents propriétaires avaient ajoutés et qui font partie de l’histoire de cette moto : la diode zener est resté sur son radiateur Triumph mais est maintenant sous la selle et j’ai également gardé le support de feux arrière chromé, lui aussi d’origine Triumph.

 

J’ai longtemps hésité sur la couleur. Toute noire mais ca fait trop noir. Réservoir rouge, trop Ducati, gris on en voit partout… et comme Burgundy n’était que pour les dernières années, pourquoi ne pas conserver cette couleur ? Pas de regrets, c’est superbe avec les longues lames chromées des badges.

 

 

Autre grand débat sur le net : robinet d’huile ou pas robinet d’huile ? Vu qu’en 3 semaines, le réservoir se vide intégralement dans le carter, j’ai choisi l’option robinet d’huile. En plus, la pièce m’a été fournie à l’achat avec un contacteur électrique. Après montage, si le robinet est ouvert, la batterie est coupée donc pas de risque d’oublier théoriquement.

J’ai également remis un guidon plat d’origine, peut être trop plat pour mon dos, je verrais bien à l’usage.

 

Une nouvelle saison à rouler, Coupes Moto Légende, AMC, Bold d’Or Classic, Neurton… Mais je sens bien que le moteur n’est pas au mieux de sa forme. Consommation d’huile variable, performance aléatoire, bruits mécaniques… Et puis régulièrement j’avais une bague d’échappement qui se dévissé. Après analyse du problème, le pas de vis de la culasse était bouffé. Une réfection de culasse s’imposait et quitte à refaire le haut, autant refaire le bas moteur aussi.

 

La encore, Tricati intervint. « Tu sors le moteur du cadre et tu me l’amènes, y’en a pas pour longtemps ». Voilà une proposition qui ne se refuse pas ! Mais je ne voulais pas être assisté et récupérer bêtement le moteur refait sans jamais avoir vu ce qu’il y a dedans. Tricati me promis de ne pas y toucher sans que je sois là. Je lui apporta le moteur et deux heures après il était intégralement démonté. Tout fut mesuré et contrôlé pendant que je listais les pièces à changer.

 

 

Retour à la maison, trois nuits sur la part list à repérer les pièces et leur « part number » correspondant et j’obtins une belle liste que j’envoyai à Tricati et à Bertrand. Après plusieurs échanges, Bertrand me renvoya la liste exacte à commander à Andover. Après réception, la culasse fut envoyée chez Gonin à Lyon. A son retour, Tricati me dit : « tu viens vendredi matin, on assemble le moteur l’après-midi, on le remonte dans le cadre samedi et on fait les essais sur route le dimanche. Et lundi tu vas au bureau avec ».

Si nous n’avions pas perdu une journée à cause d’une bielle ovalisée, à mon grand étonnement, le timing aurait été juste ! C’est beau la compétence.

 

Depuis, j’ai fait environ 3500 kilomètres sans réel problème. J’ai cru serrer à plusieurs reprises lors du rodage mais en fait, le niveau de cuve du carbu était mauvais entrainant un arrêt du moteur dès que je le sollicité trop. Beaucoup d’inquiétude mais pas de dégats.

J’ai également enlevé le montage du robinet sur l’huile par peur de l’oubli et remplacé toutes les durites par des neuves tressées. J’ai remonté un guidon BSA un peu plus haut et confortable que le cintre plat. J’ai également ajouté un filtre au carbu et JJP m’a fait un magnifique porte-bagage en inox.

 

 

 

Norton Atlas de 1968 : c’est la toute dernière année de fabrication (1963-1968) et la Norton Commando commençait déjà à être produite. Elle n’a plus de Magdyno mais un allumage batterie-bobines. Le tambour double-came à l’avant est une option d’époque. La couleur Bordeaux (Burgondy) est spécifique aux tout derniers modèles.

 

 

 

 

Fiche technique

 

Modèle :                                  Norton Atlas

Année :                                    Mai 1968

Cylindrée :                               750cm3

Architecture moteur :               Bicylindre vertical transversal calé à 360°

Puissance :                               49ch à 6800tr/min

Allumage :                               batterie/bobines

Carburateur :                           un seul Amal 932

Boite à vitesses :                      AMC 4 vitesse à droite, première en haut.

Cadre :                                    « Featherbed »étroit double berceau tubulaire

Frein avant :                             Tambour double cames de 203mm Norton

Frein arrière :                           Tambour simple came de 178mm

Réservoir :                               16,5 litres

Pneumatique av/ar :                  3,25x19 Dunlop K81 / 4,00x18 Michelin Macadam

Bougies :                                 NGK BP8ES

Huile :                                      Carrefour 15W40…

 

Modifications :
 

Modification du faisceau électrique pour ramener la clef de contact entre les compteurs. Ajout d’un filtre à huile automobile pour augmenter le volume d’huile, le refroidissement et filtrer les impuretés.

Guidon BSA un peu plus haut que le cintre plat pour plus de confort.

Pipe mono-carburateur et Amal 932 neuf avec filtre à air K&N. Comme ça, pas de synchro et qu’un seul carbu à acheter !

Ajout d’un optique acceptant les ampoules automobile de type H4 et d’un porte-bagage en inox fait sur mesure !

Caches culbuteurs Dunstall pour faire beau.

Kick Commando parce que j’ai trouvé que ça et qu’il est plus confortable.

 

Restauration

 

Partie cycle :

Cadre repeint à l’époxy, roulements de roues et de direction étanches, axe de bras oscillant changé. Réservoir traité Restom et repeint. Faisceau électrique refait et modifié avec remplacement de tous les composants. Allumage à rupteur conservé. Suspension HAGON, selle refaite à neuf. Resterait à reconditionner correctement la fourche

Peinture : Carrosserie PARCHINA à Domaine (38)

 

Moteur :
 

Culasse microbillée avec réfection des pas de vis de bagues d’échappements, changement des sièges, guides et soupapes. Réalésage en +60 avec donc changement de pistons, rectification de vilebrequin et « désovalisation » d’une bielle. Cylindre microbillé et repeint en noir. Roulement de vilebrequin et de boite à vitesse changés.

Quelques difficultés pour identifier les pièces puisque le moteur hérite de certaine pièces de Dominator (culbuteurs de 99) alors que d’autres sont déjà des pièces de Commando.

Cout complet de la restauration évalué entre 2000 et 3000€.

Rectifieur : GONIN Moteur Lyon (69)

Gros des pièces commandées chez Norton Andover, d’autres chez HPRacing.

 

Par Alex pseudo Yeti

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