La Lubrification des Moteurs

Préambule :

j'ai essayé dans cet article de faire une (huile de !) synthèse des différentes connaissances que je possédais, de recherches sur Internet, de questions posées à divers mécanos d'expérience et à des fabricants d'huile.

A chacun de se faire son opinion, mais si ça peut aider à ne pas faire de bêtises sur nos vieux moteurs.... 

1/  Role de la lubrification :

·  diminuer les frottements et les résistances passives dans les moteurs, améliorer leur rendement et économiser l'énergie,

·  protéger les organes lubrifiés contre les diverses formes de corrosion et d'usure, donc contribuer à leur longévité,

·  évacuer la chaleur produite dans les moteurs

·  éliminer les impuretés et les débris d'usure,

·  améliorer l'étanchéité vis-à-vis des gaz, des liquides ou des poussières

·  évacuer, lors des vidanges, les particules dues à l'usure et aux résidus de combustion.

Un peu de théorie pour ceux que ça intéresse sinon passez au chapitre suivant !!

2/  Régimes de lubrification

On passe progressivement du frottement sec à la lubrification « idéale » où un film suffisamment épais sépare complètement les pièces. La transmission des efforts est assurée dans le premier cas par les seules aspérités des surfaces, dans le second par la pression qui règne dans la couche de lubrifiant.

 Le frottement lubrifié ou médiat est subdivisé en plusieurs régimes différents :


  lubrification limite : l'épaisseur du film lubrifiant est insuffisante pour isoler complètement les solides en contact ; si la charge devient trop forte, il ne subsiste qu'une couche adsorbée quasi mono-moléculaire. C'est la solidité de cette dernière qui empêche les contacts métal sur métal. L'aptitude du lubrifiant à former une couche adhérente, appelée onctuosité, est ici une qualité primordiale.

  lubrification onctueuse : la couche de lubrifiant est plus épaisse, elle commence à porter une partie des charges mais il subsiste des contacts entre les aspérités des pièces. En général, les pressions sont plutôt importantes et les vitesses relatives plutôt faibles.

  lubrification hydrodynamique : le lubrifiant liquide est entraîné et mis sous pression par le mouvement relatif des surfaces. Il sépare totalement ces dernières et supporte l'intégralité des charges, grâce à sa viscosité, qui correspond à sa résistance à l'écoulement. Dans ce cas de figure les vitesses relatives ne sont jamais très faibles mais les pressions restent modérées, de sorte que l'on peut négliger les déformations des pièces et la compressibilité du lubrifiant.

  lubrification élastohydrodynamique : c'est un cas particulier du précédent, lorsque la pression dans le film liquide est suffisante pour déformer localement les solides en contact, comme c'est le cas lors du fonctionnement des engrenages. Cette déformation change la géométrie du film et la répartition des pressions, mais aussi les caractéristiques des lubrifiants : à 7 000 bars et 100 °C (conditions fréquentes dans les contacts), la viscosité des huiles naphténiques peut être multipliée par 100 000 !

  lubrification hydrostatique ou aérostatique : elle consiste à envoyer, à l'aide d'une pompe ou d'un compresseur, un liquide ou un gaz sous pression pour séparer les surfaces qui peuvent alors être ou non en mouvement relatif. Elle est la garantie d'un frottement extrêmement faible et d'une absence quasi totale d'usure mais il faut une source d'énergie extérieure.

Dans nos moteurs la lubrification se fait de façon hydrostatique et hydrodynamique

 

3/ SYSTEMES DE LUBRIFICATION :

SCHEMA DE PRINCIPE

schéma de principe

Nos moteurs d'anglaises utilisent pour la plupart un système à carter sec, l'huile est contenue dans un réservoir séparé, l'huile est pompée par une pompe qui peut-être à piston (twins Triumph...), ou à engrenage (BSA, Norton, Trident...) qui la met sous pression et l'envoie dans les canalisations internes du moteur pour lubrifier les paliers, l'huile qui s'échappe lubrifie ensuite par aspersion les parois des cylindres, les roulements, les paliers d'arbre à cames, les cames, etc... A la sortie de la pompe il y a un clapet de décharge qui permet en cas de surpression , notamment moteur froid, de dériver une partie du débit directement sur le retour ou dans le carter, ceci afin d'éviter des surpressions qui sont nocives pour le débit, la pompe, et dans certains modèles les joints à lèvres. Il est important que ce clapet soit en bon état pour avoir une circulation et une pression d'huile correcte !

Notons aussi la présence d'un clapet anti-vidange qui empêche (théoriquement !!) que l'huile du réservoir se vidange dans le carter moteur à l'arrêt.

L'huile qui retombe dans le carter est ensuite pompée par la pompe de retour qui la ramène au réservoir d'huile avec souvent une dérivation qui va lubrifier sous faible pression le haut moteur : rampe de culbuteurs. La pompe de retour a un débit supérieur, de 25 à 50% à la pompe de mise en pression pour éviter que le carter se remplisse d'huile. Dans le cas de "wet sumping" c'est à dire avec un moteur dont le carter se remplit d'huile pendant le fonctionnement, symptômes : huile qui crache par les reniflards, moteur qui cogne, qui fume, vérifier en priorité les tuyaux d'huile du retour ( pas pliés, pas bouchés) , la mise à l'air du réservoir d'huile, la crépine du carter, la pompe à huile, le clapet de décharge.  

Cas particulier : Norton commando entre autres ou la lubrification du haut moteur se fait par dérivation à partir de la pompe de mise en pression, c'est donc de l'huile "fraîche" qui lubrifie le haut moteur

Considérations sur les pompes :

la pompe à engrenage à un meilleur rendement qu'une pompe à piston, elle assure une meilleure régularité du débit, il existe une pompe MORGO à engrenages pour remplacer les pompes à pistons, c'est un investissement valable pour les machines de circuit .

 

 

pompe classique                                    pompe à 4 clapets

pompe de trident : à l'intérieur 2 pompes à engrenages

 

AMELIORATIONS POSSIBLES :

D'origine la plupart de nos moteurs n'ont comme filtre à huile que de vulgaires tamis métalliques à la sortie du réservoir et dans la crépine du carter, ils laissent passer les petites particules métalliques provenant de l'usure des pièces. Les plus nocives proviennent des arbres à cames, culbuteurs, queues de soupapes et sont très agressives. Ce qui entre autre impose des intervalles de vidange rapprochés !

Pour éliminer ces particules il faut ajouter un filtre à huile moderne sur le circuit.(seul le 3 pattes Triumph/BSA en possède un en série). L'idéal serait qu'il soit placé en sortie de pompe à huile, malheureusement c'est très difficile à réaliser d'où de nombreux kits disponibles pour en placer un sur le retour d'huile au réservoir.

exemple : filtre_huile.htm

Pour refroidir l'huile l'ajout d'un radiateur sur le retour n'est pas inutile.

La pose de bouchons de vidange magnétiques est très recommandable.

 

CHOIX de L'HUILE

C'est une question très complexe et l'on peut dire qu'à chaque sorte de contact mécanique correspond une composition de lubrifiant optimale (ou moins mauvaise que les autres ...) et une façon de la mettre en œuvre. À la limite, s'il existe dans une machine 50 sortes de contacts différents, il faudrait idéalement utiliser 50 lubrifiants différents, et l'on devine facilement l'étendue des problèmes pratiques que cela peut poser.

 Exemple :

CAS des ROULEMENTS

  • Contrairement à une idée fausse mais bien ancrée dans les esprits, le but premier de la lubrification des roulements n'est pas de réduire les frottements ; il faut avant tout que le lubrifiant crée à la surface des pièces (corps roulants, pistes et cages) des films adhérents très solides, interdisant tout contact métal contre métal, pour éviter le grippage. Un excès de lubrifiant, d'ailleurs, produit généralement une augmentation des frottements et un échauffement qui peut être très préjudiciable à la durée de vie du composant. Parmi les rôles secondaires on peut noter aussi l'évacuation des calories et la protection contre la corrosion.

Une huile trop épaisse induit un patinage des billes et des rouleaux, ils ne tournent pas et c'est toujours la même partie qui reste en contact avec la cage induisant une usure rapide !

LES HUILES :

Lubrifiants d'origine animale

Ils sont constitués essentiellement d'esters résultant de la combinaison d'acides gras avec la glycérine. Ce sont souvent des « ancêtres » mais certains entrent encore dans diverses compositions :


  liquides : oléines, huiles de lard, de pied de bœuf ou de mouton, etc., très onctueuses, huiles de poisson, de baleine, de phoque, glycérine autrefois utilisée pour son point de congélation très bas.

  pâteux : oléostéarines, suifs (qui deviennent très acides par oxydation), suintines et brais résultant du traitement de la laine, lanoline très utilisée dans les produits antirouille car elle absorbe l'eau.

  solides : stéarine, dont l'usage est restreint à la formulation de graisses très dures.

Lubrifiants d'origine végétale

Ce sont en général des combinaisons d'acides gras peu ou pas estérifiés. Certains sont encore largement utilisés en addition dans les huiles de pétrole ou dans les graisses :


  liquides : huiles semi siccatives (s'épaississant par oxydation) de coton, de colza, huiles non siccatives d'arachide, d'olive, et surtout de ricin intéressante par sa forte viscosité et la possibilité de l'utiliser dans une large gamme de températures.

  pâteux : huiles de palme, de coco et de coprah, liquides aux températures tropicales mais pâteuses dans nos régions.

  solides : résines et colophanes tirées du pin, pouvant résister à l'eau.

Lubrifiants d'origine minérale


  liquides : huiles de houille, de schiste, utilisables comme produits de remplacement, et surtout huiles de pétrole.

  pâteux : vaseline.

  solides : soufre utilisé autrefois pour sauver les paliers endommagés, talc, mica, bisulfures de molybdène et de tungstène, graphite, sulfure de plomb, oxyde de zinc.

Lubrifiants d'origine synthétique


  liquides : silicones, polyglycols, esters phosphoriques, esters aliphatiques, polyoléfines, métaux liquides.

  pâteux : verres, borates et oxyde de bore B2O3 (pâteux à chaud), graisses silicones.

  solides : polyéthylènes, polytétrafluoroéthyène (P.T.F.E.), savons (stéarates de zinc, de calcium, d'aluminium ...), oxyde de plomb PbO, disulfure de tungstène, phtalocyanine, fluorure de graphite, fluorures de calcium, de baryum et de lithium, nitrure de bore.

 Caractéristiques d'un lubrifiant

Les lubrifiants utilisés dans un moteur de véhicule doivent répondre à des conditions de qualité suivantes :

a) La viscosité
La viscosité caractérise les forces de frottement qui interviennent entre les molécules d'un fluide seulement quand celles-ci sont en mouvement les unes par rapport aux autres.
Elle se mesure de différentes manières. La méthode la plus courante est celle d'Engler.
Cette méthode consiste à comparer la vitesse d'écoulement d'un certain volume d'huile à celle d'écoulement d'un même volume d'eau par un trou de petit diamètre (1 mm, par exemple).

La viscosité de l'huile diminue avec l'élévation de la température.
La qualité d'une huile est d'avoir un degré de viscosité suffisant pour assurer un frottement fluide aux températures de fonctionnement des organes du moteur : de 80ºC à 150ºC.

b) L'onctuosité
L'onctuosité est la facilité pour un lubrifiant de bien adhérer aux surfaces métalliques.

c) le point d'inflammation
C'est la température à laquelle l'huile émet des vapeurs. Ces vapeurs risquent de s'enflammer. La température d'inflammation est environ : 200ºC à 250ºC.

d) Le point de congélation
C'est la température où l'huile ne s'écoule plus. Elle doit être la plus basse possible. Pour les régions tempérées, cette température est de l'ordre de –25ºC à –20ºC.

Différents types d'huiles moteurs

Les huiles moteurs sont classées suivant leur viscosité, les normes de classement sont déterminées par la S.A.E. (Society Automotive Engineering).
On distingue :
Les huiles multigrades dont la viscosité est donné pour une valeur de la température.
On trouve les huiles SAE 10W, 15W, 20W, 30, 40, 50.

Exemple 1 : Une huile classée SAE 10W signifie que :

· 10 indique la valeur de la viscosité,
· W indique que la valeur de la viscosité a été mesurée à la température de 0ºF (-18ºC).

Exemple 2 : Une huile classée SAE 40 signifie que :

· 40 indique la valeur de la viscosité,
· l'absence de lettre indique que la valeur de la viscosité est donnée à la température de 210ºF (100ºC).
· une huile SAE 40 est plus visqueuse qu'une huile SAE 30 à la température de 210ºF.

Les huiles multigrades dont la viscosité est donnée pour deux valeurs de la température.
On trouve les huiles SAE  10W30, 10W40, 10W50
                                       15W40, 15W50
                                       20W40, 20W50.

Exemple : 15W40
                                      15W viscosité à 0ºF,
                                      40 viscosité à 210ºF.

Qualités d'huiles

    LES HUILES MINÉRALES

Elles sont extraites de la distillation du pétrole brut et raffinées à hauteur de la qualité du produit recherché

Particularité des huiles hydro-craquées ou  huiles à molécules converties : elles subissent plusieurs raffinages et ont des propriétés voisines des huiles de synthèses

LES HUILES BASES DE SYNTHÈSE

Elles sont obtenues par polymérisation (union de plusieurs petites molécules en une seule grosse molécule). En clair, on prend des huiles minérales (dites "conventionnelles") et on les retravaille en laboratoire.
Dans les huiles de synthèse, il existe deux familles principales :
Les PAO (Poly-Alpha-Oléfines) issues de la chimie de l'éthylène (carbochimie [= pétrochimie]). C'est la plus courante de cette famille car la plus fiable (la Mobil 1 est la PAO la plus célèbre). Il s'agit en l'espèce d'une polymérisation d'hydrocarbures (les oléfines).
Les ESTERS obtenus par réaction d'alcool et d'acides organiques. C'est le summum en matière de lubrification. Fonction de ses esters , cette huile de base possède des propriétés naturelles d'adhérence au métal (polarité magnétique), résiste au cisaillement mécanique, et son endurance aux très hautes températures est exceptionnelle. Toutes ces vertus et son coût la réservent le plus souvent à la lubrification des motos... et des avions !

    LES DEMI SYNTHÉTIQUES

Comme leur nom l'indique, elles sont composées pour partie des distillats du pétrole et de l'industrie de la pétrochimie . Comme elles ne sont strictement soumises à aucune réglementation, les composants de synthèse peuvent atteindre de 1 à 60 % environ des parts de fabrication. C'est pourquoi l'on trouve au sein de cette vaste famille le meilleur comme le très moyen.
Les technosynthèses (autre appellation plus commerciale des semi-synthé ou des huiliers souhaitant se démarquer des demi synthé tout-venant) peuvent indistinctement s'élaborer à partir de n'importe quelle base dite synthétique.

CONCLUSION : Qu'elle huile pour nos anglaises ????

A partir des différents documents rassemblés, des questions posées à différents interlocuteurs on peut résumer le choix suivant les moteurs :

Ne jamais employer une huile détergente dans un ancien moteur au passé inconnu sans une révision . En effet, les boues et vernis accumulés depuis des années dans le cas de l'emploi d'huile minérale pure vont sous l'effet détergent de l'huile moderne, décoller cette "crasse" et boucher ainsi les canalisations ce qui aura pour effet de provoquer le "coulage" de bielles par manque de graissage.

Ne pas employer d'huile trop fluide sur les moteurs anciens, les jeux d'usinage sont plus importants que sur les moteurs modernes, il faut plus de pression, ( a titre indicatif les moteurs de F1 fonctionnent avec 1kg/cm² de pression pour pas bouffer de puissance !). D'où ne pas utiliser d'huile en dessous du grade 15W50

Une multigrade est préférable car c'est au démarrage qu'un moteur s'use le plus, une huile fluide à froid circule mieux

VIEUX MOTEURS PAS REFAITS, avec jeux de fonctionnement importants :

Huile minérale peu détergente (gamme classic chez certains fabricants) viscosité 20W50

MOTEURS REFAITS

Huile minérale de bonne qualité 20w50 pour usage normal,

huile synthétique 15w50, 20w50, 20w60 pour usage sévère

On ne m'a donné AUCUNE INCOMPATIBILITE pour les huiles synthétiques

Un grand merci à Yves M pour cette étude très précises

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